Critique de la saison 7 de Black Mirror : « Extrêmement imprévisible »

Disponible sur : Netflix

Total d’épisodes regardés : 6 sur 6

En 2023, le scénariste Charlie Brooker a opté pour une approche novatrice lors de la création de la sixième saison de Black Mirror, sa célèbre série d’anthologie au ton techno-noir, empreinte de dystopie. Désireux d’éviter la redondance, il a revu le format de la série, cherchant à ne pas apparaître, comme il l’a exprimé, comme « la série sur le transfert de conscience à travers un petit dispositif ». Avec le retour d’une septième saison, il semble avoir trouvé un équilibre avec cette étiquette simpliste : cette nouvelle saison présente des épisodes très caractéristiques de Black Mirror, regorgeant d’histoires liées au transfert de conscience, tout en abordant de nombreux thèmes familiers mais sous un nouvel angle. Elle témoigne d’une certaine assurance et d’une fluidité dans son identité propre.

Il est visible dès l’épisode inaugural de la suite, intitulé « USS Callister : Vers l’infini », qui se révèle être une suite captivante du film « USS Callister » sorti en 2017, inspiré de Star Trek. Alors qu’ils continuent à traquer le vaisseau rempli de doubles numériques, le groupe (dirigé par Nanette, jouée par Cristin Milioti) se retrouve désormais immergé dans un vaste serveur de jeu, où un sociopathe a été remplacé par un « univers entier », comme l’indique un des personnages. Ce mélange d’enjeux moraux typiques des productions de Brooker et de la rigueur des valeurs d’une œuvre à succès en fait un véritable chef-d’œuvre de science-fiction.

Il existe également un épisode connexe, habilement élaboré, lié au film d’aventure immersif dans lequel vous êtes le héros, intitulé « Bandersnatch ». Ce « Plaything » psychédélique ne propose qu’un unique moyen de visionnage – contrairement aux multiples possibilités offertes par « Bandersnatch » – mais il bénéficie du retour (très fugace) du talentueux Will Poulter. Peter Capaldi et Lewis Gribben incarnent ensemble un journaliste spécialisé dans les jeux vidéo, nerveux (écho à la carrière antérieure de Brooker), qui établit, à l’instar de Rencontres du troisième type, une communication avec une myriade d’entités numériques appelées Thronglets, dans une trame narrative bien plus décalée, ambitieuse et inattendue qu’elle ne le laisse supposer.

Ce qui rend Black Mirror si particulier, c’est son étonnante capacité à surprendre, même au-delà de sa propre structure : l’épisode troublant et controversé « Bête Noire » semble suivre la logique familière des récits de Quatrième Dimension et Contes de l’Inattendu, avant de conclure sur une note si incroyable, « oui, ils ont vraiment fait ça », qu’on ne peut s’empêcher d’applaudir, interloqué. En revanche, « Eulogy » ne choque que par sa profonde mélancolie : une réflexion à la Eternal Sunshine sur la mémoire et l’amour perdu, avec Paul Giamatti, qui se distingue par une présence rayonnante et joyeuse. Parmi les brillants acteurs de Black Mirror, Giamatti interprète à merveille la vision colérique mais finalement authentique de Brooker. Une prestation qui mérite une récompense.

Ce récit déborde d’émotions et de pathos : « Hotel Reverie » tisse une romance surprenante entre des actrices contemporaines (Issa Rae) et d’autres d’antan (Emma Corrin), s’efforçant d’imiter l’esprit de « San Junipero » cette saison (bien que sans atteindre la magie et l’intensité de cet épisode de 2016) — à condition d’accepter la premisse un tant soit peu improbable, c’est un vrai régal. De plus, on y trouve une satire percutante : « Common People », d’un ton sévère, aborde avec force la question de la commercialisation des soins de santé et la réalité des emplois précaires. Black Mirror demeure une entité aussi percutante que par le passé : satirique, étrange et profondément triste. Puissent ses récits durer encore longtemps.